La 10ᵉ édition du Baromètre des DRH, publiée par WTW, ABV Group et le Groupe RH&M, éclaire l'évolution des priorités en matière de développement des compétences et de formation professionnelle. Transformation numérique accélérée, intégration croissante de l’IA : 121 DRH révèlent les tendances qui redéfiniront leurs stratégies de formation pour les années à venir.
La compétence, pierre angulaire de la transformation
Le développement des compétences s'impose comme une priorité stratégique pour 89 % des DRH interrogés, en progression significative par rapport aux 81 % enregistrés l'année précédente. Cette tendance s'inscrit dans un contexte où l'engagement et la fidélisation des collaborateurs trônent au sommet des préoccupations RH avec un score impressionnant de 92 %. Le changement de paradigme est à l’œuvre : l’attractivité employeur, longtemps considérée comme le nerf de la guerre des talents, recule en cinquième position (78 % vs 89 % en 2024), tandis que la gestion des parcours professionnels (58 % vs 41 %) et la mobilité professionnelle (44 % vs 33 %) progressent significativement… Moins d'énergie consacrée à attirer de nouveaux talents, davantage d'attention portée à la valorisation et au développement des collaborateurs déjà présents. Ce qui s'explique notamment par la stabilisation anticipée du turn-over en 2025 pour 74 % des entreprises et par la nécessité d'optimiser les coûts de recrutement. Un constat qui reflète également une prise de conscience plus profonde : la capacité à faire évoluer son capital humain devient un avantage concurrentiel décisif.
L'IA, catalyseur d'une transformation profonde des métiers
L'intelligence artificielle s'affirme comme un facteur de transformation majeur des stratégies de formation. Si 52 % des entreprises s'estiment encore en retard dans l'intégration de cette technologie, 40 % se déclarent désormais prêtes à relever ce défi (vs 25 % en 2024) : sur un an, la progression est remarquable. L'impact de l'IA sur l'organisation du travail est perçu principalement à travers l'émergence de nouvelles compétences (65 %) et le redéploiement des collaborateurs vers des tâches à plus forte valeur ajoutée (60 %). Ces chiffres battent en brèche la vision alarmiste d'une technologie principalement destructrice d'emploi, pour privilégier celle d'un outil de transformation des métiers. On notera que, dans le domaine spécifique des processus RH, l'IA est déjà mobilisée pour le sourcing et l'évaluation des candidatures (48 %), l'accompagnement des collaborateurs dans leur évolution (45 %) et la transmission des compétences (42 %). Ces applications concrètes illustrent comment cette technologie peut être mise au service du développement des talents plutôt que de leur remplacement. La transformation numérique des processus de formation s'inscrit aussi dans cette dynamique. Le recrutement (77 %), le développement et la formation (66 %), l'évaluation (65 %) et les processus administratifs (64 %) constituent les domaines prioritaires de digitalisation. Ces chiffres confirment que la formation professionnelle se trouve au cœur de la révolution numérique des entreprises.
Quand Schneider Electric transforme la théorie en pratique
Pour mesurer concrètement l’expression terrain de ces tendances, l’exemple de Schneider Electric est éloquent : son ambitieux programme d'upskilling à l'IA, destiné à ses 150 000 collaborateurs, illustre cette nouvelle approche stratégique de la formation. Le programme s'articule autour de trois niveaux progressifs de compétences en IA : Digital Citizenship (sensibilisation), Digital Acumen (montée en compétence) et Digital Mastery (expertise avancée). Cette approche segmentée répond aux enjeux identifiés par le Baromètre des DRH : développer de nouvelles compétences (65 %) et redéployer les collaborateurs vers des tâches à forte valeur ajoutée (60 %). Plus révélateur encore, le succès de cette initiative repose sur des facteurs alignés sur les priorités émergentes des DRH : une approche stratégique (avec un soutien fort de la direction), une mise en œuvre agile (déployée en moins de 6 mois), et une personnalisation des parcours (permettant à chacun d'évoluer à son rythme). Proactivité à tous les étages ! Ou comment les entreprises les plus avancées transforment les défis de l'IA en opportunités de développement pour leurs collaborateurs.
Les nouvelles priorités des responsables formation
Pour les responsables formation, ces résultats impliquent un repositionnement stratégique autour de trois axes majeurs. D'abord, la nécessité d'un alignement renforcé sur la stratégie d'entreprise. Avec 84 % des DRH qui considèrent le soutien et l'accompagnement de la transformation comme leur priorité vis-à-vis du business, les directions formation doivent concevoir des dispositifs directement connectés aux enjeux stratégiques plutôt que des catalogues de formations génériques. Ensuite, l'impératif d'une montée en puissance des formations aux compétences émergentes. La mise en place d'organisations favorisant l'innovation et l'agilité (74 %), la gestion des emplois et des parcours professionnels (58 %) et le déploiement de l'IA (55 %) constituent les trois leviers principaux de transformation des entreprises. Les dispositifs de formation doivent donc intégrer ces dimensions pour préparer efficacement les collaborateurs aux évolutions en cours. Enfin, l'attention croissante portée à l'employabilité des seniors. L'allongement de carrière et l'emploi des seniors progressent de 6 points dans les préoccupations DRH (37 % vs 31 %), tandis que le recours à l'IA et à la robotisation est vu comme une réponse aux enjeux démographiques par 45 % des personnes interrogées (vs 28 % en 2024). De l'importance de développer des parcours de formation adaptés aux collaborateurs expérimentés, valorisant leur expertise tout en facilitant leur adaptation aux nouveaux outils et méthodes…
La qualité plutôt que la quantité
Les indicateurs de pilotage privilégiés par les DRH aideront les responsables formation à s’orienter. L’évolution de la masse salariale (84 %) et la réalisation des entretiens annuels (81 %) restent certes en tête des préoccupations ; mais l'engagement des salariés (76 %) s'impose comme un critère décisif d'évaluation de la performance RH. Plus significatif encore, la qualité du dialogue social (78 %), l'analyse de la performance de la fonction RH (70 %) et la digitalisation des processus RH (66 %) sont considérées comme des leviers majeurs d'efficacité. Ces indicateurs suggèrent que la qualité des dispositifs de formation et leur impact sur l'engagement des collaborateurs priment désormais sur les mesures quantitatives traditionnelles comme le nombre d'heures de formation. On ne s’en plaindra pas ! Confrontée aux défis de la transformation numérique, de l'intégration de l'IA et de l'évolution démographique, la formation professionnelle doit se réinventer pour répondre aux attentes croissantes des directions générales et des collaborateurs. Les résultats du Baromètre 2025 des DRH indiquent la voie à suivre : une formation plus stratégique, plus personnalisée et plus directement connectée aux enjeux de transformation des entreprises. Une opportunité pour les responsables de formation qui sauront concilier vision stratégique et pragmatisme opérationnel, innovation technologique et attention aux facteurs humains. Possibles architectes d'une transformation réussie de leurs organisations, ils pourront s’inspirer de l’exemple de Schneider Electric où cette révolution est déjà en marche.
RD
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